Eleakli, Le Monde Obscur
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Eleakli, Le Monde Obscur

Un monde nouveau a vu le jour; Eleakli. Ce monde peuplé de créatures de toutes sortes fut un jour tourmenté par une nouvelle force inconnue...
 
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 I talk to the rain

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Nubia
Déesse fondatrice du meilleur monde qui soit ! Et fière représentante du BGC
Nubia


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Rang / Fonction : En ordre : Divinité du Panthéon, Meurtrière, Déesse déchue, Ennemi des dieux, Errante dans un monde qu'elle souhaite faire souffrir, Menace universelle et finalement, Jeune femme confuse.
Âge / Coeur : Sans doute très vieille pour les humains, plutôt jeune pour les dieux, mais d'apparence entre 16 et 20 ans. / Son coeur qui ne croyait autrefois pas en ce genre de chose lui fait maintenant horriblement mal...
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MessageSujet: I talk to the rain   I talk to the rain Icon_minitimeJeu 17 Avr 2014 - 16:04

L'angoisse lui fait tourner la tête. Elle lui donne des nausées, des étourdissements ; on pourrait facilement dire qu'elle souffre de ce trouble lourd et collant. Un oiseau mort sur les épaules, tué sans raison et enroulé autour du cou ; le crime de la nature humaine, la tenant à quelques pieds au-dessus du sol. Pendue par ses gestes, abattue de ses propres souvenirs, que lui reste-t-il?

Ses pas se font pesants, appuyés, inutiles. Plus rien n'a de nécessité. Si respirer est obsolète, courir n'en est que plus vain. Mais qui est là, maintenant, pour lui en faire la morale? Qui lui hurlera "Arrête" et "Calme-toi"? Personne. Personne ne songera même à perdre son temps et son souffle pour calmer la tempête, éperdument prise du haut de sa montagne. Plus personne n'a d'ailleurs le courage de l'y accompagner, à cet instant. Le seul spectateur de sa mise en scène désespérée est elle, passive, froide, et pourtant si légère face au poids de son humanité. La pluie tombe et se rit de tout, une fois de plus, ignore la signification du mot "douleur", apaise ou gèle les coeurs sans même le savoir. Cette présence est-elle seulement indésirable maintenant? Sinon, qu'est-ce? De l'hypocrisie? De la moquerie? Peut-être le désespoir est-il si ardent qui s'agit en réalité tout au plus d'une compagnie indifférente. La solitude, elle la craint, mais l'embrasse, elle l'enlace de tout son corps comme le dernier il qui la relie à la vie ; puis elle veut la chasser, la tuer, l'enterrer six pieds sous terre. Je veux être seule à jamais, mais s'il vous plait, s'il vous plait, ne me laissez pas.

Sa course effrénée ralentit alors que l'herbe humide se dérobe sous ses pieds souillés de terre ; elle tombe sans grâce, comme un faon naissant, petite et fragile. Elle se recroqueville dans la verdure dansante, se protégeant du vent qui souffle juste à peine, assez pour lui faire savoir qu'il regarde, lui aussi. Ses dents se serrent tout comme ses poings ; se relèvera-t-elle? La question explose dans sa tête comme un champs de bataille, une décision fatidique. Ses jambes ne peuvent plus la supporter, elles refusent de faire s'avancer d'un centimètre de plus cette femme hystérique, indécise, perdue. Perdue, non pas uniquement dans le sens de sans destination, mais aussi et surtout sans espoir. Perdue comme le murmure un médecin à la suite d'un accouchement raté ou d'un diagnostic tragique. "Perdue" La pluie, elle, sait très bien où elle va. De haut en bas, vers le sol, dans la terre, pour éventuellement remonter, puis retomber.

La pluie connait son chemin, tout comme elle.

Venue des cieux pour régner, elle est tombée, tombée de très haut, pour atterrir brusquement au sol, et plus loin encore, et ce, pour finalement, un jour, remonter à la surface. Jamais aux cieux, cependant. Et maintenant, elle tombe encore, peut-être plus profondément encore que sous la terre. Elle chute et plus aucune paroi ne lui permet de s'accrocher, s'accrocher à la lumière à la surface, à "quelque part". Car sa destination, la seule et unique lui était permise, est "nulle part". Son passe-port est prêt, elle n'a même pas besoin d'en avoir preuve. Les tréfonds du monde, de la conscience, de l'âme, tout ça, ça lui connait. Elle n'a aucun mal à s'y diriger ; l'inconvénient se trouve au niveau du changement. Si elle souhaite seulement dévier sa trajectoire, que ses pas osent commettre telle rébellion, la nature elle-même la pousse vers son destin, inchangeable. Froid comme le marbre, dur comme le diamant.

Pour la première fois depuis une éternité, sa voix s'échappe.

Nubia crie. Nubia hurle, elle se débat, griffe la terre molle de ses doigts blancs, tente de combattre la pluie, le vent, l'herbe. Nubia se bat contre le monde entier.

Et celui-ci rétorque, sur un fond de tonnerre et d'éclair, que tout est vain. Toujours. Toujours. Toujours. Toujours. Vain. Tout. Pour toujours. Toujours. Toujours. Toujours.

- ...Que fais-je?

Le dos appuyé sans plus de résistance dans l'herbe, ses yeux s'ouvrent. Les gouttes ne lui accordent pas merci et s'écrasent sans intérêt sur les pores de sa peau, sur ses lèvres entrouvertes, dans sa bouche haletante, sur son nez froid, ses rouges roses, ses yeux vides, dans ses cheveux entremêlés, sur sa peau salie, son torse montant et descendant, suivant la cadence de sa respiration profonde. Elle est vaincue, et quelques instants, essaie de se plaire de ce scénario ridicule. Le combat est vain, elle le sait; malgré tout, elle le sait toujours. Elle est vulnérable. La déesse est tombée, il lui faudrait un miracle pour se relever. Mais elle ne veut pas de miracle, pas maintenant ; la défaite imminente l'apaise, quelque part, son abandon la calme. Elle n'a plus rien à quoi penser autre que son échec, sa torture est terminée, du moins pour le moment. Le monde l'a vaincu, le ciel s'est rit d'elle et, ayant perdu tout amusement à cette vue désolante, est reparti, ne laissant derrière que cette pluie à la fois distante et réconfortante.

Elle souhait silencieusement qu'un miracle ne se pointera pas afin qu'elle puisse encore un peu jouir de cette faiblesse écrasante sans perturbation quelconque. Du moment qu'elle se remettra sur ses pieds, elle sait qu'elle devra oublier ces derniers instants, effacer toute trace de faiblesse de sa mémoire, faire comme s'il n'avait été question que d'un mauvais rêve ; et ainsi, qu'elle devra retourner sur le champs de bataille. Confronter la réalité, pourchasser ces yeux égarés dans le noir, éviter l'amour, détruire ces visions et grimper jusqu'à cette femme, son sourire, sa main tendue et tout ce que cela signifie ; c'est son mandat, sa mission, son objectif final. Elle ne pourra jamais écouter la raison, car celle-ci lui échappe. La raison veut dire la vérité, et la vérité est pour Nubia autant une quête éternelle qu'un ennemi juré.

La brume fait alors son apparition, se glissant lentement sur sa vision déjà embrouillée, endormant ses pensées ; la déesse est exténuée. Du haut de la colline, là où la tempête faisait rage, elle s'endort sur les décombres de sa propre destruction, n'attendant plus rien du monde entier.
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Orion
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Orion


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MessageSujet: Re: I talk to the rain   I talk to the rain Icon_minitimeVen 18 Avr 2014 - 14:07

Spoiler:

La lourdeur. Oui, c’est ce qu’il ressentait. Ses bras sont meurtris et las de se battre , ses jambes s’affaissent sous toutes ces responsabilités, que dire de son crâne... Fleurissant aux yeux des hommes, cramoisi de l’intérieur. Ses ailes se déchirent , attachées d’une chaîne au ciel et l’autre à la terre, puis son coeur ; un fardeau de plus. Une corde supplémentaire l’extirpant de son socle psychologique. Sa raison n’est plus, ses yeux bleus sont aveuglés non pas par la pluie et le tonnerre, mais par la haine, le dégoût et l’amour.

La honte. Honte de n’être qu’un mensonge. Il n’y avait ni espoir ni lumière en ce monde. Il n’y avait qu’un miroir. Un miroir contenant un reflet sublime, mais ne recélant qu’un vide profond derrière. Il faut croire, disait-on. Croire en quoi? La déesse mère n’était peut-être rien de moins que le bourreau des inculpés et des inculpables. Vivre était un crime hideux  pour lequel il fallait se repentir en se réfugiant dans les bras d’une faucheuse portant l’auréole. L’injustice était trop dure à supporter.

Il n’aimait plus la glace dans laquelle il reconnaissait les yeux de sa mère. A poing nu il s’y frappa. Ces cheveux d’or, comme les sien et ce sourire. Rien de moins qu’une ignoble marionnette pour garder les humains sous son joug ; c’est ce qu’il était.

Au fond, peut-être que ceux qui devaient être sauvés n’étaient pas les pantins exilés sur terre, mourant de vieillesse, de feu et de sang, mais plutôt les ventriloques bornés venant du ciel qu’on devait tant idolâtrer.

Alors qui était-il vraiment? Un sauveur, un guide? Pas vraiment, tout cela était aussi faux que le reste ; il n’était pas mieux que les autres. Les éclats de verre mêlés aux drapés de liquide rouge ruisselaient sur ses avant bras. Il ne voulait plus de cette existence, il ne voulait plus de ce statut ; il réclamait l’humanité alors qu’il était libre comme l’air. Il ne supportait plus de ne pas être comme ceux qui souffrent, alors il continuait de frapper, il continuait de se maudire. Il voulait avoir mal, mal pour se sentir vivant. Il voulait, lui aussi, connaître le froid le grugeant jusqu’aux os, l’eau engouffrant ses poumons et le feu consumer sa chair. Il n’y avait rien de plus réel que la douleur, rien de plus vrai. Alors la voie qu’il choisit fut celle de désobéir. Celle de pécher.

Il avait choisi son chemin. Laissant derrière lui la prison qui lui servait de chambre dans un état aussi lamentable que ses bras, il se dirigea sur le balcon puis murmura le nom de celle qu’il chérissait tant. Embarquant sur la rambarde, il se laissa tomber dans le flot de nuages déchaînés. Il ne déploya pas ses ailes, il voulait découvrir la vérité, découvrir l’humanité. Les gouttelettes parcouraient son corps qui descendait à vive allure, elles gelaient au contact de l’air sur les parois de sa peau, dans ses cheveux et même sur ses cils. Il ferma les yeux et se concentra sur la douleur, sur le froid qui l’empalait, sur sa descente des enfers vers les cieux. Les bruits sourds des tambours jouaient au rythme des battements lents de son coeur. Puis il dérivait vers la terre.

Le temps n’existait plus.

La pluie connaissait son chemin,

Mais pas lui.


Il s’y est écrasé. Ses os, broyés, son coeur meurtris et ses larmes silencieuses, gelés, jonchaient le sol comme une feuille morte, dévorée par les insectes. Le son sourd de sa lourde chute se perdit avec celui du tonnerre. Impuissant, il dévisageait le ciel en le maudissant. Les fractures de son corps se réparaient malgré lui, les plaies se sont ressoudées, simplement, banalement, de façon ennuyeuse et normale. Il ne restait que le sang et les pleurs, lavées, perdues dans la pluie et la boue. Même pas une vulgaire trace de sa douleur, le ciel ne voulait pas que les mortels la voient. Il avait tout lavé avant que quiconque ne puisse constater l’étendue de ses blessures et la profondeur de son mal pour ne laisser que son visage de porcelaine aussi radieux que le soleil. Dégouté, il se prit la tête et hurla, désabusé par sa perfection, détruit par l’absence de vérité et de vie dans ses veines. Il fondit en larme en se recroquevillant, pleurant de ne pouvoir être comme eux, de ne pouvoir être comme elle. Il voulait la rejoindre, il souhaitait être châtié, maudit, torturé, mal aimé et, ensemble, ils règneraient sur un trône de verre translucide où tout serait aussi clair et vrai que l’eau.

Et pourtant, elle était là, à quelques mètres de lui, mais, encore un instant, il voulait continuer d’avoir mal, continuer d’y croire.
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Nubia
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Nubia


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MessageSujet: Re: I talk to the rain   I talk to the rain Icon_minitimeLun 17 Nov 2014 - 15:53

https://www.youtube.com/watch?v=ZQbgihHWNGo&list=LL154nB-1jbDdwpJvMFkiiwg&index=1

La vie n’a toujours été que mensonges par-dessus mensonges.

« Sa » vie, du moins.

Nubia n’a jamais cru en quoi que ce soit. Qu’est-ce qu’un humain face à un Dieu? Qu’est-ce qu’un Dieu face à un non-croyant? Qu’est-ce que le non-croyant envers sa propre divinité? Jusqu’où est-il possible d’aller, quand on ne croit pas en sa propre existence? En sa propre force? Et, par-dessus tout, en sa propre faiblesse?

Elle n’a jamais eu la volonté de croire. Elle n’a jamais eu le temps de croire. Alors après quoi courait-elle tout ce temps? Pourquoi sa vie n’a-t-elle toujours pu être qu’une série de questions rhétoriques s’enchaînant inlassablement jusqu’à la faire douter de la vérité elle-même, plutôt que n’être qu’une seule et simple réponse? Ce n’était pas comme si elle n’eut jamais eu le choix.

Et si sa réponse se trouvait au coeur même de ce qu’elle craignait le plus? Tout? Rien? Ce miracle qu’elle repoussait du fin fond de son être la tenait du bout des lèvres et l’amenait à la tentation, celle de céder, une fois pour toutes. Mais sa faiblesse du moment, qui serait chose du passé une fois que la déesse aurait relevé la tête, n’en deviendrait pas une si jamais elle cédait à cette aide inespérée. Cela ne pouvait pas arriver. Le peu d’espoir, de désespoir même qui lui restait reposait sur cette habilité à tout effacer, oublier complètement et remplacer. Une fois remise sur ses deux pieds, Nubia n’aura jamais fléchi. Elle ne sera jamais tombée, elle n’aura jamais hurlé. Jamais la terre n’aura senti tout le poids de son regret. C’était sa vérité, sa dernière chance.

Le mensonge, sa douleur réelle, tout cela n’était pas « naturel ». Tout cela lui avait été apporté, comme une épidémie portée par ces êtres intactes, hautains, d’une blancheur irradiante. Leur lumière l’avait souillée, comme elle l’avait également souillée de ses tourments. Elle l’avait sali de sa haine, et maintenant, il tomberait comme elle, seulement d’un peu moins haut. Elle se trouvait aux tréfonds du monde, où personne n’aurait pu l’atteindre ; il était simplement impossible qu’une créature autre que cette femme puisse se rendre aussi bas… C’est ce qu’elle croyait fermement, si jamais elle eut cru en quelque chose, alors que ses paupières demeuraient fermées, lui cachant le ciel narguant. C’est sans doute ce qu’elle aurait continué de croire, si jamais elle n’avait jamais ouvert les yeux.

Malgré toute la résistance du monde, la noirceur finit par avoir raison d’elle et la déesse reprit conscience de sa situation. Le froid. La poussière. La pluie. Et plus que tout, le redoutable miracle.

Il était tombé, dans plus de sens qu’elle n’aurait pu en mettre ; elle sentait d’ici la chaleur de ses plaies, la douceur de son sang qui avait peine à s’écouler. Non, non, tout cela ne pouvait être qu’illusions. La démence avait fini par la rattraper ; étrangement, l’idée en fut une qui eut presque achevé de la rassurer. Elle était si loin, si loin de tout que la folie se faisait presque chaleureuse, accueillante. Plus que la raison ou la bonne foi, plus que la vérité et la morale. Si seulement elle pouvait enfin sombrer pour de bon, peut-être serait-elle enfin libre de tout, libre de ses pensées et de sa tête. Tout était devenu trop lourd à porter ; le poids de la « conscience » qu’était la sienne lui donnait du mal à se relever. À force de vouloir l’effacer, peut-être finirait-elle par atteindre un tout autre niveau, là où plus rien ne l’atteindrait, au-delà de la noirceur des cieux et du néant des abysses… Mais malgré sa volonté à se détacher de tout, à se relever, devenir pour de bon le monstre sans conscience qu’elle fut toujours destinée à devenir, tout oublier et poursuivre son inlassable chasse, elle ne put constater qu’une chose.

Il était là.

https://www.youtube.com/watch?v=eeZAb1mdgXI&index=6&list=LL154nB-1jbDdwpJvMFkiiwg

Ses yeux entrouverts, posés sur cet être à la fois si pur et si souillé, ne vacillaient plus. Pendant une seconde, sans même le savoir, elle eut craint, si elle fermait les paupières l’espace d’un instant, qu’il disparaisse une fois pour toutes. La question « pourquoi » ne se formula pas dans sa tête, et elle n’avait pas besoin d’être formulée. Une crainte irrationnelle de constater sa solitude, maintenant, à cet instant précis, la prit de toute part. Elle ne voulait pas bouger, de peur qu’il s’effrite devant elle. Pour la première fois depuis ses plus lointains souvenirs, un être lui faisait face et il avait l’air en aussi mauvais état qu’elle. Et malgré tout ce qu’elle pouvait se faire croire sec puissance, malgré toutes les choses qu’elle se forçait à penser, à cet instant précis, elle ne voulait plus être seule. Le cri perçant de cet ange déchu sonna à ses oreilles comme les lamentations d’un enfant égaré ; et pourtant, elle le savait plus que jamais homme, saccagé et battu par les vérités du monde.

Et plus que jamais elle voulu être enlacée et aimée par cette douleur qui n’était pas la tienne. Les sentiments s’écoulaient en elle comme des instincts primaires qu’elle n’aurait jamais découvert ; c’était sans doute le cas, d’ailleurs. Son propre mal l’empêchant de réfléchir rationnellement, elle cessa tout questionnement et ses pensées cédèrent leur place à ses pulsions. La déesse rampa sur le sol granuleux et humide, noir. Sa robe, ses cheveux, sa peau ; tout ce blanc immaculé souillé paraissait maintenant tellement plus clair sous toute la noirceur.

Il était là.

Et pour la première fois de sa vie, elle voulait qu’il y reste.

Qu’il ne la nargue pas comme la pluie, qu’il ne s’enfuit pas sous la terre comme ces gouttelettes traitresses, qu’il ne remonte pas au ciel après l’avoir touchée comme ce déluge qu’elle détestait tant. Sa peau était toute aussi parsemée de pluie et de terre, tout comme la sienne. Les deux se trouvaient dans l’enceinte de ce théâtre désolant. Elle en fut rassurée. Pendant quelque instants, elle constata son imperfection. Sa douleur, son tourment, ses ombres. Et elle se sentit bien comme jamais avant, et encore une fois elle ne se posa pas de questions. L’instant où ses pensées reprendraient vie, tout déconnecterait. Elle se perdrait de nouveau et ne connaîtrait plus jamais la liberté qu’elle ressentait en ce moment sans le savoir ; car là était son seul futur, étant la Déesse qu’elle fut.

Mais à cet instant, c’est une main féminine, tremblante et ternie qui se leva lentement du sol. Cette main de femme, d’humaine, n’avait pour objectif que d’atteindre et d’effleurer cet homme, cet humain. Peut-être le simple toucher de ces deux corps ferait-il immédiatement rompre le sort ; peut-être ce spectacle vulnérable et éphémère redeviendrait-il instantanément une vérité et un mensonge de deux êtres de verre dégoûtés l’un de l’autre, s’aimant l’un et l’autre, révulsés par leurs propres sentiments, peur propre identité. Peut-être. Mais cette pensée ne réussit pas à atteindre Nubia. Et elle l’effleura, doucement, faiblement, et elle sentit en elle tout le mal du monde d’une façon tellement particulière qu’elle s’y attacha sur le coup, ébahie et émue. Elle voulait tout garder de cet instant pour elle seule, ne jamais revenir où que ce soit qu’elle fut avant. Car ce simple contact, elle n’aurait jamais espéré y avoir droit en une éternité. Surtout pas maintenant, alors qu’elle était tombée au point de ne pas se relever sans se tuer lentement et renaître. Jamais, ô grand jamais elle n’aurait espéré avoir ce miracle déroutant et tragiquement bon. Les yeux posés sur ce petit être, elle n’eut pas la force de prononcer la moindre parole ; ni plus de poser le moindre geste supplémentaire. Le bout de ses doigts reposaient à moins d’un millimètre de sa main, assez pour qu’elle ressente les pulsations de son âme grisée battre jusqu’en elle.

Et elle resterait ainsi jusqu’à ce que le monde décide de la reprendre, si tel était son désir. Nubia et Orion, sous la pluie éternelle, étendus de tout leur long dans leurs désespoirs rivaux et mutuels, baignant dans la passion d’une douleur incertaine et le regret d’une existence qu’ils n’eurent jamais choisi.
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Orion
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MessageSujet: Re: I talk to the rain   I talk to the rain Icon_minitimeSam 3 Jan 2015 - 2:33

https://www.youtube.com/watch?v=nG6GNWhhm1I

N’est-ce pas ainsi que sa vie avait toujours été? Une triste scène dont il était l’unique spectateur, consterné et impuissant. Il regardait tous les maux de l’univers du haut des cieux en priant pour que le monde se porte mieux. Le temps lui même se faisait las de laisser tomber ses grains alors qu’il n’y avait qu’oreilles pour ces plaintes stridentes. Qu’ont donc à faire les dieux en ces temps si dur, où sont les rayons de lumières ardents , déchirant l’obscurité d’une nuit pleine de canons. Où sont donc les faiseurs de miracles et les héros, triomphant sur leurs montures blanches, alors que les continents s’effondrent?

Tout cela n’était que le dernier pêché qu’on eu cru cadeau dans cette belle boîte ; l’espoir? À ces enfants orphelins , au veuf amoureux et seul, à cette paysanne pauvre et battue, à ces amoureux peinés et souillés sous une pluie qui daigne même les laver ; oh oui à vous , infortunés de ce monde. Muets malgré eux , ils envoient toutes ces plaintes quelque part dans les tréfonds de la galaxie, jusqu’à ce qu’un bon samaritain les ramasses en les cueillant au passage de ses grandes ailes blanches.

Il collectionnait toutes ces petites poussières et en meublait le ciel. Chaque regret, larme, cris et peine s’y trouvait. Elles étaient là, scintillantes, pour que jamais on ne les oublis et qu’un jour peut-être, elles inspirent d’autres par leur courage.

C’est la dernière chose qu’il vit avant de se fracasser sur le sol terreux et sale, laid. Toutes ces bougies hurlantes que le soleil s’efforçait de faire disparaître au matin. Cette fois-ci, ce furent de lourd nuages gris qui s’en chargèrent en libérant leur larmes aiguisées. Orion regardait le ciel et compris que ni l’astre brulant, ni les ouates grises ne pourraient vraiment cacher la misère des hommes , elle y serait toujours quelque part, derrière, là ou on ne peut la voir. C’est à cet instant précis qu’il en ressentit tout le poids , c’est à ce moment qu’il compris ce qu’était vraiment la douleur , et son coeur s’en déchira.

Des larmes roulaient sur ses joues et se mélangèrent à la pluie. Le bleu si vivant de ses yeux trahissait les faibles battements de son coeur. S’il eut envie de mourir un instant, ce fut celui-ci. Il avait honte d’exister. Honte de vivre dans le but d’en aider autant et d’en accomplir si peu. Lentement il dirigea sa main vers son poignard égaré dans la boue. L’idée de s’arracher les ailes lui vint, et même le coeur tant son désespoir était grand.

Une main l’en dissuada. Une main habituellement aussi froide qu’une nuit d’hiver , qui cette fois souffla d’une brise aimable ses flammes désolées.

Il tourna légèrement la tête vers Nubia. Le regard de l’ange semblait désorienté, perdu. Il regardait tel un enfant supplie sa mère de le réconforter après un horrible cauchemar. Orion gisait, impuissant, détrôné, inachevé. L’allégresse habituelle du célestin se refusait à l’amabilité du geste de sa douce, et il la contemplait, comme si elle était irréelle. Il la savait présente, mais refusait d’y croire. Tant de fois il l’avait vu en rêve, tant de fois il avait cru l’enlacer et valser avec elle sur un tapis de lys. Pourtant, elle traînait là, une autre étoile, une larme, parmi tant d’autre qui lui serait arraché lorsqu’il retournerait au ciel. Orion ferma doucement ses paupières , ne sachant trop s’il devait croire à la présence de Nubia ou non, il se contenta de sourire en acceptant l’étreinte de sa main en tentant de murmurer «je t’aime» , mais aucun son ne sortit de ses lèvres devenues bleu tellement il faiblissait.

Une minute qui parut cent an de silence s’écoula. Il se relevait si péniblement, maintenant toujours d’une poigne tremblante ce contact délicat qui, pourtant, était à cet instant la seule et unique chose pouvant le maintenir en vie. À genoux devant Nubia , il n’osait pas la regarder dans les yeux. Il se contenta d’avancer doucement vers elle et déposa lourdement sa tête contre son épaule. Les ailes de l’ange s’affaissèrent et, malgré lui, ses épaules se mirent à hoqueter. Il n’avait plus la force de jouer les héros, ni la force de n’être quoi que ce soit d’autre qu’un être de chair et de sang, souffrant comme tous les autres dans cet instant misérable où il n’y avait ni soleil, ni lune, ni étoiles, ni dieu , ni espoir.

Il n’y avait que la pluie.
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Nubia
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MessageSujet: Re: I talk to the rain   I talk to the rain Icon_minitimeJeu 23 Juil 2015 - 4:36

Comme elle aurait aimé que le monde s'écroule, que les murs tombent, que la poussière se lève, que les éclairs mettent à feu les champs et étouffent les cris; elle aurait aimé que tout se détruise comme elle se détruisait, et ainsi pouvoir rire dans la plus, crier au triomphe.

Mais Nubia devrait encore attendre avant de danser dans les décombres de l'univers. Le tonnerre chantait sur sa tête comme pour la maudire de son existence impure, mais elle commençait à se faire au langage de la tempête. Cela ne l'effrayait plus autant; plus maintenant qu'elle avait trouvé aussi misérable qu'elle. La douleur s'était séparée en deux, elle la partageait désormais avec plus pur, plus blanc, plus frêle encore. Elle savait que cet Ange tentait d'expliquer sa présence, elle ne lui offrit aucune parole qui ait pu le persuader. Il finirait par comprendre; oui, comprendre que leurs destins se croisaient toujours dans ces moments fortuits, comme si les fils de leur existence même s'entremêlaient pour se séparer et ensuite se recroiser dans un mélange de confusion, de douleur et de silence. Ils ne pouvaient pas avoir de fin heureuse, ils étaient condamnés à des bribes de tragédie.

C'est avec douleur que les yeux de la déesse acceptèrent le sourire peiné de l'Ange, comme une lame au coeur. "Ne souris pas, cesse", voulait-elle lui crier. Mais tout comme elle, il se battait contre ses démons intérieur, contre le monde entier, contre lui-même. Elle ne pouvait pas lui dicter son combat; ce n'était pas son champs de bataille. Le sien était parsemé de crevasses, de rochers et de brume, elle avait peine à le parcourir sans trébucher, alors elle n'avait pas les moyens de l'aider à traverser le sien. Sa main ne pouvait que tenir la sienne, dans l'espoir qu'ils se retrouvent finalement au point d'arrivée, ensemble, en un morceau ou du moins, simplement vivants. Peut-être, seulement peut-être sortirait-elle de là plus vivante, moins brisée qu'elle ne l'eut été toute sa vie, moins brisée qu'elle l'eut été à cet instant même où les doigts de cet homme se mouvèrent sur les siens.

Une présence, une vraie, un simple touché pourtant tellement réel. Elle avait oublié la sensibilité que pouvait ressentir sa peau, la douceur dont étaient capables ses doigts. Le sentiment lui était simplement inconnu. Enfermée dans les tréfonds de sa propre tête, elle avait longtemps imaginé l'étreinte de la pluie, le touché de l'eau sur son visage et le son de la tempête dans ses oreilles... et maintenant qu'elle avait goûté à tout cela, contre sa propre personne, elle n'eut jamais imaginé que mieux encore que le baiser cruel de la nature ravageuse, elle y préférerait la présence d'un être qu'elle s'était juré détester. Le mensonge continuait. Elle resta de marbre lorsqu'il se redressa, elle n'avait peur de rien. Elle ne reculerait pas devant lui, pas lorsqu'elle se craignait plus que tout. Ces grandes ailes ne lui servaient plus à s'envoler loin d'elle; elles étaient l'image même du lourd fardeau qui reposait sur son corps immortel. Elle aurait aimé avoir pitié, mais avoir eu des ailes, les siennes auraient été toutes aussi lourdes et salies. Elle ne broncha pas lorsqu'il s'approcha: qu'il vole ses lèvres d'un baiser ou qu'il l'empoigne de sa dague acérée, qu'elle différence cela ferait-il? Il n'y avait plus de sens à se dérober maintenant. Nubia accepta donc avec ce silence, ce mal de vivre, le poids de sa tête contre son épaule presque nue, ses cheveux mouillés et son front glacial contre sa peau humide et froide. Ses yeux se levèrent sur les ailes qui s'affaissèrent autour d'eux, formant une sorte de cocon, quelque chose entre la cage et l'abris. Quelque part au fond d'elle, la jeune femme se surprit de pouvoir soutenir ainsi la forme tremblante de cet être malheureux, et elle se surprit d'autant plus à admirer la force qui le poussait à verser des larmes qu'elle était incapable de voir apparaître à ses yeux. Presque étrangement, ce fut comme si la présence de cet ange tombé des cieux et son mal l'eut calmée dans ses propres tourments, comme s'il avait amoindrit ne serait-ce qu'un peu le coeur de l'orage. Elle n'avait plus la force de crier, plus même de pleurer, et un certain vide à la fois effrayant et apaisant la remplissait lentement. Était-ce ce que les mortels appelaient la compréhension? La compassion? Nubia l'ignorait, elle ignorait tout de ces termes auxquels elle n'avait jamais réellement voulu porter attention, par ferme croyance que ces concepts ne l'aideraient jamais à vivre. Après tout, voulait-elle seulement vivre? Si elle pouvait périr en détruisant le monde entier, serait-elle satisfaite? Verrait-elle la fin avec un sourire aux lèvres? Connaîtrait-elle ce concept de regret? Elle ne pouvait y penser, pas maintenant. Pas au moment où ses pensées n'étaient que brouillard et déchéance. Si elle trouvait une réponse à l'une de ses questions, elle briserait l'illusion qui la maintenait en vie, agonisante mais vivante. Si elle n'avait pas été brisée son la pluie, avec son ange, elle aurait mis fin à cette excuse d'une vie par orgueil, haine propre et honte, sans aucun doute. "Nubia", comme elle s'était élevée, ne laisserait personne gagner contre elle, pas même elle-même.

La femme qui hantait son corps frêle à ce moment accepta la douleur de cet homme et, toujours en laissant sa réflexion de côté, sentit son bras se mouvoir et sa main se poser dans ses cheveux en bataille. Ces mèches qu'elle aurait normalement qualifiées de "blondes comme le blé, éclatantes comme le soleil à son paroxysme", étaient plaquées contre sa tête dans un désordre illogique, trempées, ternies. Tout comme lui en entier, à l'évidence. Ses doigts sentirent malgré tout la douceur au travers la raideur et prirent la liberté de se perdre légèrement dans sa chevelure, plus par une sorte d'exploration curieuse que de réconfort. Nubia ferma les yeux doucement, le laissant se vider de sa souffrance contre son épaule, cela lui fut égal, la vision de ses ailes recourbées en une étreinte singulière la rassura même si elle ne se l'avouerait jamais. Avant même qu'elle n'en ait conscience, elle se mit à flatter ses cheveux avec une douceur distraite, lentement, faiblement, un peu plus comme une présence fantôme qu'un contact assumé. Lorsqu'elle eut vent de ses propres actions, cependant, elle s'arrêta tout aussi doucement, ne retirant cependant pas sa main de leur position initiale. La déesse tourna légèrement la tête, sa joue entrant en contact avec la tempe du jeune homme. Son coeur se serra étrangement, elle détestait cela. Si elle en avait eu la force, elle l'aurait arraché de sa poitrine et écraser au creux de sa main. Non, pas maintenant. Elle ne voulait pas réaliser tout ce qui arrivait, sa faiblesse, son affection, sa passivité - pas maintenant, pas maintenant, pas maintenant. Ses paupières toujours fermées sur ses iris, Nubia tenta de se conditionner à ne pas reprendre conscience tout de suite de ses actes, sous peine de se détruire elle-même; de terminer ce que la vie elle-même avait commencé. Elle mit un frein à ce brouillard qui menaçait de se dissiper, et durant un instant la douleur l'étreignit jusque dans chacun de ses os. Elle se détestait plus que tout au monde. Plus que le monde lui-même; elle voulait sa propre destruction. Mais si jamais elle osait en prendre conscience...

Un sourire étira lentement ses lèvres craquelées, imparfaites, bleuies par le froid, tous des traits si subtils et pourtant, si... humains. Elle ouvrit faiblement les yeux, à peine, tellement qu'elle put encore apercevoir les gouttelettes toujours accrochées à ses cils et menaçant de tomber à tout moment. L'étreinte de sa main derrière la tête de l'ange se fit encore plus fantomatique alors que l'air froid vain remplacer son souffle; elle ouvrit les lèvres pour souffler les premiers mots qu'elle put formuler et aussi les plus sincères, sans voix :

- Comme nous sommes laids...
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